
Aujourd’hui, j’aimerais aborder avec vous le sujet délicat de la polygamie et de son rapport au célibat. Le célibat prolongé touche de plus en plus de personnes dans nos sociétés contemporaines, notamment en raison de difficultés à trouver un/e partenaire ou à s’engager dans une relation stable. Certains avancent alors l’idée que la polygamie, c’est-à-dire le fait pour une personne d’avoir plusieurs conjoints, pourrait être une solution au célibat. Mais qu’en est-il réellement ? La polygamie peut-elle constituer un remède efficace et éthique au célibat ? C’est ce que nous allons examiner ensemble au cours de cet exposé.
Définitions et contexte sociétal
Avant d’aller plus loin, il me semble important de bien définir les termes du sujet.
Le célibat désigne l’état d’une personne qui n’est pas mariée. On distingue classiquement le célibat temporaire, situation fréquente chez les jeunes adultes, du célibat prolongé qui concerne les personnes restant durablement seules.
La polygamie est l’union conjugale entre un individu et plusieurs conjoints. Il existe différentes formes de polygamie :
- La polygynie : union d’un homme avec plusieurs femmes.
- La polyandrie : union d’une femme avec plusieurs hommes.
- Le polyamour : relation intime entre plus de deux partenaires de toutes orientations sexuelles.
Dans nos sociétés occidentales, la monogamie (union d’un homme et d’une femme) reste la norme. Pourtant, la polygamie, notamment sous forme de polygynie, est historiquement et culturellement très répandue dans de nombreuses régions du monde.
Aujourd’hui, certains mouvements prônent une légalisation de la polygamie en France et en Europe, au nom de la liberté individuelle et pour lutter contre la solitude. Mais cette idée se heurte encore à de fortes résistances sociales et juridiques.
Les causes du célibat prolongé
Avant d’envisager la polygamie comme solution, intéressons-nous aux racines du célibat prolongé dans nos sociétés contemporaines.
Plusieurs facteurs peuvent conduire une personne à rester durablement célibataire :
- Des difficultés personnelles : timidité, manque de confiance en soi, traumatismes affectifs, problèmes de santé physique ou mentale…
- Un investissement excessif dans le travail, les études, les loisirs, qui laisse peu de place aux relations amoureuses.
- Le célibat subi suite à une rupture, un veuvage, l’absence d’opportunités de rencontres…
- Le célibat choisi par goût de la solitude, refus de l’engagement, volonté de liberté…
- Des exigences excessives en matière de séduction et de relation amoureuse.
- Des changements sociétaux : individualisme, virtualisation des rapports humains, mobilité accrue…
Ces facteurs, souvent combinés, rendent l’accès à une relation de couple plus compliqué pour une part croissante d’adultes. Le célibat n’est donc pas toujours un choix délibéré.
Les conséquences du célibat prolongé
Quelles sont les conséquences du célibat prolongé sur la vie quotidienne et la santé des personnes concernées ?
Sur le plan personnel, le célibat durable peut générer :
- Un sentiment de solitude.
- Une baisse de l’estime de soi et de la confiance en soi.
- Une limitation des interactions sociales.
- Un manque d’intimité physique et émotionnelle.
Sur le plan médical, plusieurs études ont mis en évidence un sur-risque pour les célibataires de longue date de :
- Dépression et troubles anxieux.
- Problèmes cardio-vasculaires.
- Démence.
- Mortalité précoce.
Bien sûr, tous les célibataires ne souffrent pas de ces difficultés. Mais statistiquement, l’absence durable de vie conjugale représente un facteur de risque pour la santé et le bien-être psycho-social.
Les bénéfices supposés de la polygamie
Face à ce constat, certains avancent l’idée que la polygamie pourrait constituer une alternative viable pour les personnes peinant à trouver un/e partenaire exclusif/ve.
Quels sont les principaux arguments invoqués en faveur de la polygamie comme remède au célibat ?
- Permettre à plus de gens de vivre une relation conjugale.
- Réduire la solitude affective et sexuelle.
- Partager les responsabilités (financières, parentales, domestiques…)
- Multiplier les sources de soutien et d’épanouissement affectif.
- Vivre plus sereinement certaines incompatibilités conjugales.
- Accroître les opportunités de rencontres amoureuses.
- Offrir une alternative à l’infidélité.
- Donner une plus grande liberté dans la construction de son mode de vie affectif.
Sur le papier, un modèle polygame semble donc présenter certains avantages, notamment pour les personnes isolées. Mais qu’en est-il concrètement ?
Les réalités complexes de la polygamie
Regardons maintenant plus objectivement les réalités vécues au sein des unions polygames, au-delà des idées reçues.
Dans les faits, on observe souvent dans les mariages polygames :
- Des problèmes de répartition équitable du temps et de l’attention entre les différents conjoints.
- Des rivalités, des tensions, voire des conflits entre conjoints.
- Une difficile gestion de la vie quotidienne et des relations avec les enfants de chacun.
- Des difficultés économiques accrues.
- Une potentielle dépendance financière et affective des épouses envers le mari.
- Des risques de transmission accrue des infections sexuellement transmissibles.
Au niveau psychologique, la polygamie exige de tous les partenaires :
- Une grande maturité affective.
- Des capacités de communication exemplaires.
- Une confiance en soi solide.
- Un détachement vis-à-vis de la jalousie.
- Une gestion avisée des émotions.
- Beaucoup d’empathie et de respect mutuel.
On le voit, la polygamie s’avère souvent complexe à vivre au quotidien et requiert des qualités personnelles et relationnelles élevées. Les problèmes conjugaux ne s’évanouissent pas par magie avec l’arrivée de conjoints supplémentaires.
Conséquences sociétales de la polygamie généralisée
Imaginons un instant que la polygamie se généralise dans nos sociétés occidentales pour remédier au célibat. Quels en seraient les effets à grande échelle ?
On peut supputer plusieurs conséquences possibles :
- Une potentielle précarisation des hommes célibataires, privés d’épouses.
- Une restriction de l’accès des femmes les plus précaires au mariage.
- Un renforcement des inégalités et de la domination masculine dans le couple.
- Une augmentation de la natalité… mais uniquement dans les familles polygames.
- Des impacts démographiques majeurs à long terme.
- Une privatisation accrue des rapports conjugaux, au détriment du lien social.
- Le développement de « marchés du mariage » et de dot exacerbant les inégalités.
- De nombreux défis juridiques et économiques (droits matrimoniaux, sécurité sociale…).
Bref, la généralisation de la polygamie aurait des répercussions profondes sur l’organisation sociale, les équilibres démographiques et les rapports de genre à l’échelle de la société.
Polygamie éthique : oui, mais comment ?
Nous l’avons vu, la polygamie n’est pas une baguette magique pour résoudre tous les problèmes de célibat. Mais dans certains cas particuliers, elle pourrait néanmoins constituer une option acceptable si certaines conditions éthiques sont réunies :
- Une motivation sincère, en respectant le cadre religieux le cas échéant.
- L’accord libre et éclairé de tous les conjoints.
- L’absence de dissimulation ou tromperie entre partenaires.
- L’égalité des droits et devoirs pour tous les membres.
- Une répartition équitable du temps entre conjoints.
- La reconnaissance légale et sociale de tous les liens conjugaux.
- La sécurité matérielle de tous les partenaires et enfants.
- La protection contre les risques sanitaires.
- Le respect de l’intérêt supérieur des enfants.
- La préservation des droits des personnes célibataires non polygames.
Une telle éthique polygame éclairée semble malheureusement difficile à concevoir dans le contexte culturel français actuel, imprégné d’une longue tradition monogame.
Rendre le célibat plus acceptable
Plutôt que de bouleverser nos repères monogames, ne faudrait-il pas rendre le célibat prolongé plus acceptable et vivable dans notre société ?
Pour une meilleure intégration des personnes durablement célibataires, nous pourrions collectivement :
- Reconnaître la diversité des modes de vie affectifs.
- Lutter contre la stigmatisation du célibat.
- Valoriser les apports des personnes seules dans la société.
- Soutenir les personnes isolées, sans les inciter au mariage.
- Adapter les politiques sociales aux besoins spécifiques des célibataires.
- Encourager de nouvelles formes de lien social, d’entraide et de vie partagée.
Plutôt qu’un facteur d’exclusion, le célibat pourrait alors devenir un mode de vie parmi d’autres, digne d’intérêt et de respect.
Conclusion
En conclusion, il apparaît que la polygamie ne constitue pas, dans le contexte français actuel, une réponse éthique et pragmatique adaptée aux difficultés croissantes de célibat.
Pour autant, le célibat prolongé doit être reconnu comme un phénomène social majeur, avec ses avantages et ses inconvénients spécifiques selon les individus. Des efforts collectifs sont nécessaires pour mieux intégrer les personnes durablement célibataires et réduire les risques d’isolement.
J’espère que cet exposé vous aura permis de réfléchir de manière nuancée à ce sujet délicat. N’hésitez pas à me faire part de vos réactions et questionnements complémentaires. Je me tiens à votre disposition pour en discuter plus avant avec vous.